A day with new developments

Ce message qu’il reçut un peu plus tôt dans la journée l’avait bien surpris. Bianca avait été aux abonnées absentes depuis un long moment et il ne s’attendait pas à ce qu’elle revienne d’elle-même alors qu’il avait tout mis en œuvre pour qu’elle lui revienne rapidement. Il lui avait envoyé de nombreux bouquets de fleurs, lui avait fait livrer des bijoux, lui avait laissé des mots des plus attentionnés, s’excusant un million de fois au sujet du pari qui lui avait permis de démarrer leur histoire. Il refusait de laisser tomber parce que Bianca, elle n’était pas comme les autres filles. Elle avait ce petit plus qui la rendait bien plus intrigante que les autres. Il s’était attaché à elle comme jamais auparavant. Mais elle n’avait pas voulu lui laisser une chance, et depuis il espérait qu’elle se rende compte de ce qu’elle perdait. Son message, il était court, sans fioritures et ne lui laissait aucune chance de comprendre ce qu’elle voulait lui dire. Aussi, Will prit cela comme un test et se mit en tête de la séduire, de mettre toutes les chances de son côté. Il avait pris soin de porter des vêtements qui le mettaient en valeur, avait fait un effort sur sa coiffure qu’il dénigrait depuis quelques temps, et surtout, il s’était arrêté chez un fleuriste pour ne pas venir les mains vides. Le bouquet de roses rouges était majestueux, orné de lys blancs qui donnait du cachet au bouquet. Il était prêt à se racheter, à lui faire comprendre que le pari n’avait pas de meilleure récompense que sa rencontre avec elle, et qu’il ferait tout pour qu’elle cesse de lui en vouloir. Une fois prêt, il lui envoya un SMS à son tour : ‘Je serais là dans dix minutes.’ Sobre comme elle, il ne se trahissait pas. Will était aux anges et avait envie de crier sur tous les toits qu’il était heureux qu’elle lui laisse une nouvelle chance. Dix minutes plus tard, il sonnait à sa porte. Il était impatient qu’elle lui ouvre, mais il hésitait sur l’attitude à adopter. Devrait-il l’embrasser, lui fondre dessus, ou rester droit comme un i et attendre qu’elle fasse le premier pas ?

Il était impatient de savoir de quoi il en retournait. Pourquoi le faire venir maintenant sans lui donner un seul indice ? Will craignait ce qu’elle pouvait lui annoncer, mais il espérait en même temps qu’elle soit revenue sur sa décision. Il avait fait tout ce qu’il avait pu pour lui plaire, et si elle n’avait même pas pris la peine de le remercier, il ne s’y était pas arrêté. Elle finirait bien par comprendre que le pari était stupide mais qu’il ne jurait que par elle. Quand elle ouvrit enfin la porte, il la dévisagea. Elle restait là, les bras ballants, ne disant mot, et il la trouvait mignonne parce qu’il sentait qu’elle était tracassée, ce qui arracha au chirurgien une légère mimique, un demi-sourire. Sourire qui disparut bien vite lorsqu’elle le salua aussi froide que la glace, piquante comme le piment. Soupirant bruyamment, il ironisa : « C’est vraiment tout ce que tu as retenu de moi ?! » Il lui tendit quand même le bouquet, se justifiant alors qu’elle semblait surprise de l’attention – et plutôt agréablement – et qu’elle l’invitait à entrer : « Je n’allais pas venir les mains vides pour une fois que tu acceptes de me voir. » Il rentre chez elle, remarquant qu’elle a fait un effort pour que ce soit rangé. Il observe en silence, trouvant son dernier bouquet dans un vase, ce qui lui fit plaisir, et il tint à le lui dire, bien que ce soit de façon dissimulée. « Je pensais que tu l’aurais jeté, content de voir qu’il te plait. » C’était bon signe qu’elle accepte ses cadeaux. Mais il s’éloignait du but principal de sa venue, et se retournant vers elle, s’approchant doucement, il lui demanda promptement : « Alors…Qu’est ce que tu avais à me dire de si important ? » Voulait-elle lui parler de ses sentiments ? Lui donner une autre chance ? Il l’ignorait, mais il trouvait sa demande bien trop solennelle, bien trop directe pour qu’elle tienne à lui parler de leur relation. Craignant la sentence, il sentit son cœur battre à tout rompre et ne regardait qu’elle, sans la lâcher des yeux. Il voulait savoir.

Rien n’était trop beau pour elle. S’il devait vendre ses biens pour la combler, la gâter indéfiniment, il le ferait. Si elle avait envie de quelque chose, elle n’avait qu’à claquer des doigts et elle l’obtiendrait. Il voulait lui montrer à quel point elle comptait pour lui, que ça n’était pas juste une amourette sans importance. Elle lui avait ouvert les yeux sur bien des choses, et il l’admirait pour le rôle qu’elle jouait dans la vie des autres. Elle disait que c’était trop, et qu’il n’avait pas besoin de faire tout ça, mais il n’était pas d’accord. C’était le seul moyen qu’il avait trouvé pour lui montrer à quel point elle comptait pour lui, elle qui lui manquait tant. « Je ne savais pas comment te faire comprendre que ce n’était pas juste un pari, Bianca. » Au moins, elle n’avait pas rejeté ses offrandes et lui laissait une chance d’y croire. Elle semblait soucieuse, angoissée à l’idée de lui révéler ce pourquoi il était là. Il esquissa une moue inquiète alors qu’elle lui prenait les mains pour l’inviter à s’asseoir sur le canapé du salon. S’installant, il attendait la peur au ventre qu’elle lui dise de quoi il en retournait. Il avait un mauvais pressentiment parce qu’elle s’éternisait. Et puis la nouvelle tomba, et ce n’était absolument pas ce à quoi il s’attendait : elle était enceinte. Une expression de choc vint s’incruster sur son visage, laissant bien vite place au soulagement. C’était une excellente nouvelle ! Et pourtant il s’interdisait de laisser exploser sa joie. Se pinçant les lèvres, il lui déclara doucement : « Je...J’aurais très certainement sauté de joie il y a quelques temps, mais là, au regard de la situation, je ne sais pas si je peux me réjouir ou non. » Il était penaud, il était pris entre deux feux, parce qu’il ignorait la position de Bianca. Que souhaitait-elle ? C’était la grande question. Il poursuivit alors en lui prenant les mains plongeant son regard dans le sien : « J’ai toujours rêvé de fonder une famille. Mais je sais pas ce qu’il en est de toi. Tu comptes le garder, avorter ? » Il ne lui forcerait pas la main, mais lui voyait là un coup de pouce du destin, comme si le bébé pouvait la rapprocher de lui et lui permettre de la récupérer. Il lâcha ses mains pour venir caresser sa joue du bout de ses doigts pour lui faire une révélation, une déclaration : « Je vais me répéter mais ce n’était pas qu’un pari. Je ne jure que par toi. J’ai tout perdu mais je m’en fiche si je t’ai toi. » Et d’un aveu, Will se rapprocha de la jeune Petrov pour l’enlacer et la prendre dans ses bras. Ses craintes toutes envolées.

Elle voulait le garder. Cette affirmation rassura l’ex-chirurgien. Quoi de plus beau que de donner la vie ? Ca ne donnait aucune certitude sur leur relation, ça ne voulait pas dire qu’elle souhaite l’élever avec lui, mais vouloir garder son enfant, c’était lui accorder de l’importance, parce qu’un enfant est conçu par amour la plupart du temps, et entre eux, il était convaincu que c’était bel et bien ce qu’il s’était passé. Cet enfant n’était pas totalement désiré, mais il était bel et bien là et Will était heureux de se dire qu’il allait enfin devenir père. Mieux encore, l’enfant serait celui de Bianca, la femme qu’il aimait, la seule qu’il avait aimée. Personne ne pouvait se vanter d’avoir véhiculé autant de sentiments chez lui. Il souriait. C’était la meilleure nouvelle qu’elle puisse lui annoncer. Ils allaient être parents. La jeune femme ne le repoussa pas, au contraire, elle resserra son étreinte comme si elle avait un pouvoir bénéfique sur elle. Bianca le rassurait de par ses gestes. Elle ne lui avait encore rien donné comme garantie, qu’il avait repris espoir ; leur relation ne pouvait pas aller droit dans le mur. Le chef de la neurochirurgie et ses combines ne triompheraient pas. Il était l’homme qui allait fonder une famille avec la belle Petrov, celui qui la rendrait heureuse et personne ne pourrait aller contre cela. Quand la belle brune reprit la parole, il crut rêver. Il obtenait d’une certaine manière des excuses sur son comportement, et elle lui avouait également l’avoir fait exprès pour le lui faire payer. Elle était parvenue à ses fins car elle l’avait presque anéanti et il s’était fait violence pour ne pas craquer. Mais il ne regrettait pourtant pas ce pari, et il le lui fit savoir : « Je ne le regretterais jamais. C’est grâce à ce pari que je me suis lancé. C’est grâce à ce pari que j’ai appris à te connaitre, à t’aimer et que maintenant, tu portes mon enfant. » Quand la main de la jeune femme se posa sur sa joue, il ferma les yeux un instant, juste quelques secondes, le temps de relever son regard vers elle et la contempler tandis qu’elle lui faisait une belle déclaration. Son sourire ne cessait plus de s’élargir. Posant sa main sur celle de Bianca qui se trouvait sur sa joue, il pencha la tête vers elle, capturant ses lèvres dans un baiser passionné comme une réponse bien mieux formulée que n’importe quelle autre phrase. Puis, se reculant un peu, il la regardait amoureusement avant de lui souffler contre ses lèvres : « Viens emménager chez moi. Tu ne manqueras de rien, je ferais aménager une chambre pour le bébé ! » Tout allait bien vite soudainement, mais il était trop excité à l’idée de voir le bonheur lui sourire, ne pensant même pas au problème soulevé par sa mise à pied.

La situation n’était pas idéale pour la venue d’un bébé. Will était suspendu pour faute et en attente d’inspection de son cas particulier, il se devait de faire attention à ses dépenses et avait déjà vendu sa voiture pour pouvoir anticiper d’autres problèmes à venir. C’est chouette d’avoir une belle maison, mais encore faut-il pouvoir l’entretenir et sans salaire, cela devient compliqué. De plus, il se voyait mal envoyer Bianca travailler alors qu’elle était enceinte. Il se devait de trouver une solution rapide. Il y en avait bien une, mais il refusait de retomber dedans car il mettrait la maman et l’enfant en danger. Il refusait de se tracasser pour l’instant. Il avait encore du temps avant l’arrivée du bébé. Si ça se trouvait, il retrouverait son poste de chirurgien plus vite que prévu, mais en attendant il devait donner des garanties à Bianca qui semblait douter de tout et qui en plus ne se voyait pas emménager avec lui. Will avait du mal à comprendre. Elle voulait que son enfant ait un père, mais elle ne voulait pas vivre avec lui. C’était un peu précipité certes de lui demander d’emménager avec lui, mais les circonstances étaient bien particulières, il fallait donc s’adapter. Elle n’avait pas la même conception des choses que lui et ça posait problème. S’insurgeant, il essaya de lui faire comprendre où il voulait en venir : « Mais qu’est-ce que tu racontes ?! Ca ne sera pas chez moi, mais chez nous. Tu t’en fiches des voisins ! Je veux ce qui a de mieux pour toi et notre bébé. » Il ne se voyait pas l’élever dans un endroit à l’étroit où ils ne pourraient pas installer tout le nécessaire pour que leur enfant grandisse dans les meilleures conditions. Il avait vécu dans une petite maison avec son frère et sa sœur et il s’était promis de réussir pour que sa famille n’ait pas à vivre ce qu’il avait vécu. Il tint à la rassurer quant à son travail, même s’il n’y croyait pas vraiment lui-même. Il fallait qu’ils partent du bon pied et qu’elle ne s’inquiète pas à tout va. « Ne te préoccupes pas de mon travail. Je vais m’en occuper. » Elle se tenait responsable de son trouble au travail, sauf qu’elle n’y était pour rien, il avait été cupide et naïf, et il ne pouvait s’en prendre qu’à lui-même. Elle essayait de trouver une solution mais c’était peine perdue. Comment prouver qu’il ne s’était pas drogué de son plein gré ? Il soupira. « Ils ne me croient pas. En même temps, ils ont une vidéo à l’appui et j’étais drogué, que ce soit à mon insu ou non, ils n’en ont que faire. C’est pas grave, je trouverais bien autre chose à faire. » Il haussa les épaules et l’enlaça pour la rassurer : « Mais tu n’as pas à t’en faire, on va s’en sortir et notre bébé sera le plus heureux du monde ! » Il l’embrassa sur la tempe, resserrant son étreinte.

Will était comme elle, il méprisait les riches qui ne se rendaient pas compte que la vie était dure. Et pourtant, il s’était installé parmi eux, sans pour autant être des leurs. Le jeune Bennett avait trimé pour avoir le droit de posséder des biens, de se faire plaisir et de mener une vie plus que correcte. Il ne l’avait pas volée, alors il considérait qu’il pouvait profiter de tout ce qui lui était accessible sans se sentir coupable. Et puis, il dépensait des fortunes pour les plus démunis, car il savait très bien d’où il venait. Les épreuves le contrariaient, mais ne l’accablaient pas pour autant. Il pouvait perdre tout ce qui était matériel, il n’en avait que faire. Si ça lui était accessible, il en profitait, mais si un jour il devait quitter cet endroit, il le ferait sans état d’âme, et s’il avait besoin de vendre ses biens pour s’en sortir, il le ferait là encore. En fait, s’il s’évertuait à garder sa maison, c’était uniquement parce qu’il était persuadé qu’il y faisait bon vivre et qu’ils possédaient une certaine tranquillité à rester ici. Bianca, pensait différemment et exigeait des efforts de sa part si elle en faisait un en vivant ici. Sauf que ce qu’elle lui demandait était en gros de se comporter comme un homme qui n’en a que faire d’elle. « Mais tu sais très bien que c’est impossible ! Quand je ferais les courses tu me diras que j’ai acheté quelque chose pour te nourrir ! Bianca, ne m’impose pas de restrictions, c’est pas comme ça que fonctionne une relation ! » Il ne pouvait pas annihiler ses envies de la combler. C’était au dessus de ses forces. Elle insistait cependant sur le problème majeur qu’était son emploi, et il grimaça. Il n’était pas sûr de pouvoir en ressortir vainqueur, il se battait contre des instances particulières. Mais il reconnaissait que son ex-ami avait menti et donc failli à son rôle de docteur, ce qui pouvait faire pencher la balance, mais les recours en justice étaient toujours très pénibles. « Il a bafoué le serment d’Hippocrate, il finira bien par être puni. Faut que je voie les recours possibles en justice, mais ça va être un long combat. » Il n’était pas seulement contrarié pour cela. La possibilité que Bianca aille voir son ami le gênait. Pire, il se demandait jusqu’où elle serait capable d’aller et il était contre son implication : « Pourquoi irais-tu le voir ? Je ne voudrais pas qu’il s’en prenne à toi aussi. Si y a des choses que je peux encaisser, pas celle-là. » On ne sait jamais jusqu’où les gens sont prêts à aller pour vous détruire, et il était hors de question qu’elle se mette dans une position délicate. Aussi, même si elle avait également envie de se lancer dans les études pour croire en un avenir meilleur, Will mit un frein à ses objectifs, cherchant à être réaliste : « Dans six mois tu ne pourras plus quitter la maison. Je peux gérer les revenus, ne te force pas à faire quoi que ce soit. T’auras tout le loisir de t’y mettre quand il sera né ! » Pourquoi ne pas profiter de sa condition de femme libre avant d’être mère et d’avoir des responsabilités ?

Will comprenait totalement la position de Bianca, parce que lui aussi venait d’un contexte social assez pauvre et le changement pouvait bouleverser tout un être, mais comment faire autrement ? Pouvait-elle considérer vivre seule avec leur enfant un instant ? Lui ne pouvait l’envisager. Il resserra son étreinte, déposant un nouveau baiser sur le front de la jeune femme pour la bercer lentement durant sa réponse : « Je sais tout ça, et je te demanderais pas de changer, juste d’apprécier ce que je peux t’offrir. » Ils pouvaient également déménager, mais selon Will ça ne serait que déplacer le problème vers d’autres. Il voulait que tout convienne à Bianca, qu’elle ne soit pas la seule à faire des efforts, ni qu’elle se sente lésée. Alors quand elle lui indiqua détester qu’on fouille dans ses affaires, visant la femme de ménage, il tint à la rassurer, montrant qu’il pouvait s’adapter à toutes ses envies à sa convenance. Tout était modulable : « Pour ce qui est de la femme de ménage, je peux lui demander de ne pas toucher à tes affaires… » Elle ferait les choses différemment. Mais ne voulant pas non plus que sa femme de ménage soit victime de représailles, il était prêt à passer derrière elle pour la couvrir également. Il était hors de question qu’il la mette à la porte. Il prit son visage dans ses mains, caressant son visage avec attention, contemplant ses yeux, pour lui souffler sincèrement : « Je ne veux pas que tu te forces, mais je te préfère à mes côtés. » Elle avait l’air de se remettre en question pour éviter ses craintes, mais Will préférait qu’elle décide de ce qu’elle préférait. Ils pouvaient trouver des solutions. La situation était inédite pour elle comme pour lui alors il ne servait à rien de bousculer les choses et conduire tout ceci à un échec.
Elle était dotée d’une incroyable bonté. Généreuse au possible, il savait que dans sa volonté d’aller voir le neurochirurgien ne résidait là qu’une envie de l’aider. Sauf que Will se méfiait comme de l’huile sur le feu de son ancien ami. Il avait peur pour elle, car s’il découvrait qu’elle était enceinte de Will, dieu sait ce dont il était capable, jaloux au possible. Il préférait prévenir que guérir, mais connaissant la demoiselle, elle n’en ferait surement qu’à sa tête. Mais elle serait son soutien, celui qui lui manquait ces derniers mois. « Merci. » Lui dit-il simplement avant de capturer ses lèvres. Bianca craignait aussi d’être à la maison. Une femme dynamique comme elle ne pouvait pas accepter de ne pas occuper ses journées, et il pouvait le comprendre. Will n’avait pas grand-chose à lui proposer, sauf qu’il pouvait en toucher mot à certains membres du personnel de l’hôpital qui l’appréciaient encore. « Je peux peut-être te trouver quelque chose à faire à l’hôpital, comme aider au dispensaire ou un truc du genre… » Bien qu’elle n’ait aucun diplôme, le fait est qu’elle avait le cœur sur la main et c’était amplement suffisant.

Il était heureux de voir que les choses semblaient aller dans son sens. Il était rassuré de voir que la jeune femme n’avait pas tant de griefs à son égard, que ces longues semaines passées à l’ignorer n’étaient qu’un châtiment éphémère qui ne changerait rien aux sentiments réels qu’ils avaient pu développer. Parce que Will ne voyait pas Bianca de la même manière que les autres. Elle avait une toute autre importance. Il ne s’agissait pas là d’une fille qu’on fréquente de temps en temps, comme bon nous semble. Pour lui, c’était bien plus que ça. Il s’imaginait un futur avec elle, un futur à trois puisqu’ils préparaient donc la venue d’un enfant. Tout ce qu’il voulait, c’était le bonheur de la ravissante Petrov. Ils ne seraient pas toujours d’accord, car elle avait son caractère et il avait le sien, mais il ferait en sorte que les choses aillent dans le bon sens. Il ferma les yeux un instant alors qu’elle lui caressait la joue et qu’elle lui avouait avoir déjà hâte de vivre avec lui. C’était drôle, jamais il n’aurait cru entendre pareille nouvelle et il ne put s’empêcher d’ironiser pour plaisanter : « J’avais commencé à croire que tu voulais plus de moi… » Or, à présent, il était sûr que leur relation était sérieuse pour elle aussi. Il s’imaginait déjà rentrer après le travail, s’il pouvait récupérer son job, et la trouver là, resplendissante, se jetant à son cou, impatient de la retrouver. La vie méritait d’être vécue pour ce genre de moments. Il était convaincu qu’il pourrait enfin avoir le droit à un bonheur indéfectible avec elle. Le baiser de Bianca il avait la couleur de l’amour et la saveur de l’avenir. Il voudrait lui souffler qu’il l’aimait de tout son cœur, mais il craignait de l’effrayer ; quand elle proposa de faire quelque chose de cette soirée sans se prendre la tête, il se pencha vers elle et la saisit par la taille pour la porter dans ses bras, se relevant de tout son long, la faisant tournoyer dans les airs avant de poser son front contre le sien et se perdre dans ses yeux amandes. Enjoué au possible, il la questionna dans un sourire. « Je suis d’accord ! Je te laisse choisir ce que tu veux : restau ? Plateau télé ? Autre chose ? » Elle n’avait qu’à demander, elle était la reine des lieux.

Etait-ce un rêve ? Will avait du mal à croire que les choses se déroulaient si bien. Lui qui pendant des semaines avait cru avoir tout perdu, ne plus avoir de quoi se réjouir dans la vie, ayant perdu travail, amour et même amitié, il se disait qu’il n’avait plus qu’à sombrer de nouveau. Pourtant, il ne s’était pas laissé tenter, comme une révélation, ne sachant pas bien pourquoi, il avait continué d’être animé par l’espoir que tout s’arrange. Et c’était ce qui était en train de se passer avec Bianca. Ils allaient être parents. Dans sept mois, sa vie serait toute autre. Il ne savait pas vraiment à quoi s’attendre, même s’il avait toujours veillé sur son frère et ses sœurs, avoir un enfant à soi était un tant soit peu différent. Vivre avec Bianca était déjà un grand pas en avant. Eux qui se connaissaient depuis relativement peu de temps, ils allaient devoir apprendre à composer avec leurs caractères différents et faire des concessions comme des sacrifices pour l’autre. Will était évidemment prêt à les faire, parce qu’il savait que le bonheur est plus difficile à conserver qu’à acquérir. Bianca pouvait lui demander n’importe quoi dans la limite du raisonnable, il ferait tout ce qu’il peut pour lui convenir. Elle le rendait heureux comme elle était, elle n’avait pas besoin de feindre et de se comporter d’une autre façon que ce qu’elle le faisait d’ordinaire. Elle n’avait qu’à être là pour le combler. S’il lui avait laissé le choix du programme du restant de la journée, il ne fut pas étonné de sa demande. Trop de changement en l’emmenant dans un restaurant huppé pouvait la contrarier. Une femme enceinte avait des désirs particuliers, et tant que les fast-foods ne devenaient pas sa nourriture journalière, il pouvait bien la combler à ce niveau de temps en temps. « Et si on allait dans un restaurant qui fait de bien meilleurs hamburgers que ceux que tu peux manger dans un fast-food ? J’en connais un bien ! Mais on n’est pas obligés, si tu tiens à ton fast-food, on peut y aller. » dit-il dans un sourire bien sincère, la reposant au sol en caressant sa joue. Elle n’avait qu’à dire un mot, et le tour serait joué.

Comme quoi la petite Cendrillon qu’était Bianca n’avait pas des goûts de bas étages. Elle pouvait aimer les hamburgers sans pour autant préféré la mauvaise qualité. Will était content qu’elle finisse par entendre raison à demi et qu’elle fasse le bon choix. Il espérait qu’elle ne serait pas déçue, car il ne sortait pas le grand jeu, il se contentait juste de lui faire un minimum plaisir, et tant qu’il pouvait le faire sans la contrarier, il le ferait. Ils venaient du même monde mais à l’heure d’aujourd’hui ils appartenaient à deux sphères bien différentes, et si Will s’efforçait de vouloir emmener la demoiselle dans une haute sphère, il ne voulait pas la brusquer au risque de tout gâcher. Souriant à dents pleines, il s’enquit : « Allez en route alors si mademoiselle Petrov a faim, on va mettre le turbo ! » Il y aurait forcément une dissonance entre l’endroit où ils se rendaient et la voiture qu’il possédait, mais qu’importe, ce n’était pas parce qu’il était propriétaire d’une Porsche qu’il n’avait pas le droit d’emmener la femme qui partageait de nouveau sa vie dans un humble restaurant. Will contempla Bianca un instant. Elle était parfaite. Ce n’était que maintenant qu’il remarquait sa tenue qui lui seyait comme un gant. Elle aurait pu s’habiller comme un sac que ça ne changerait rien pour lui, il l’aimait comme elle était. Lui se remerciait d’avoir mis toutes les chances de son côté ce matin en faisant un gros effort vestimentaire. Il était on ne peut plus présentable. La jeune femme l’embrassa pour le remercier conquise, et cela lui fit chaud au cœur. Parce qu’elle comprenait enfin qu’il était différent qu’il n’était pas là juste pour la mettre dans son lit. La serrant dans ses bras, reprenant contact avec ses lèvres, il ponctua sa phrase d’un baiser : « Ne me remercie pas, c’est tout naturel de me comporter comme ça avec toi. Je ne veux que ton bonheur. Et ton bonheur est mien aussi. » Se détachant ensuite d’elle pour nouer ses doigts aux siens, il la traine à l’extérieur de son appartement, direction la Porsche Panamera et le restaurant.